
L’origine du mot “Bugaia”

En occitan “bugada”, en français “lessive”: pourquoi deux racines différentes pour une même opération?
A l’origine, le mot qui désigne cette opération est identique dans les langues romanes:
- D’une racine germanique présente dans le francique “bûkôn” et l’allemand “bauchen”, l’italien a tiré “bucato”, l’occitan “bugada” et le français “buée”. En français, on usait aussi du verbe “buer” et du nom “buanderie”.
- L’espagnol a tiré son nom “colada” de l’action qui consiste à “colar (la) bugada“, c’est-à-dire faire passer de l’eau à travers le linge.
- Puis le français a pris le mot “lessive” pour esquiver une confusion entre “la buée” et “la buée”, c’est-à dire la “lessive” et la “vapeur”.
Ce mot vient du latin populaire “lixiva” (= qui se rapporte à la lessive), participe passé formé sur le nom “lixa” (“aqua lixa” = eau chaude pour faire la lessive). L’italien a “lisciva” et l’espagnol “lejia”. En occitan on dit “lissiu”. Le français a aussi pris le mot “lessive” au sens de poudre à laver.
Un autre intérêt est que ce mot est un bon marqueur dialectologique. Dans le pays dit niçois, lo mot peut avoir 4 formes:
- A Nice, “la bugada” ;
- A l’est d’une ligne Eze-Blausasc-Berre-Lucéram, “la bugaia” ;
- Dans les autres vallées du Paillon, Vésubie, Var bas et moyen, basse Tinée, “la bugaa” (prononcer /bugaou/) ;
- Dans le pays gavot au sens étroit, celui de la palatalisation (c’est-à-dire les lieus où “la cabra” devient “la chabra” et “la galina” “la jalina”), “la bujaa” (prononcer /budjaou/) (haute Tinée, Val d’Entraunes).
C’est-à-dire qu’en dehors de Nice, La Trinité et Villefranche, tout le pays perd le -d- intervocalique.
Ainsi, la recherche linguistique sur cette activités nous oriente à la fois vers l’étymologie et la dialectologie et nous présente un test pou identifier les parlers appelés par les linguistes vivaro-alpin.
Bernard FRUCHIER, le 18 Septembre 2011